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Inal : Le lieu où reposent les martyrs, transformé en terrain de football. Imprimer

 

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« L’année prochaine nous irons à Inal », c’était au cours d’une conférence de presse organisée en 2010 par le Front de Lutte contre l'Esclavage, le Racisme et l'Exclusion en Mauritanie (FLERE), que le président de l’IRA, Biram Ould Dah Ould Abeid avait fait cette annonce.

 

Aujourd’hui, la promesse est tenue car les veuves des victimes et leurs enfants ainsi que ceux qui les ont accompagnés se sont recueillis le 28 novembre 2011, à Inal, lieu où, vingt et un ans plus tôt, avaient été massacrés des soldats négro-africains par leurs frères d’armes.

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Les militants des droits de l’homme et tous ceux qui les accompagnaient ont fixé leur stèle sur la fosse commune de 28 officiers et sous officiers Negro mauritaniens pendus le 28 novembre 1990.  

Le Comité préparatoire des journées de souvenir aux Martyrs d'Inal avait mis en place un programme très chargé d’activités et d’émotions, qui ont commencé par la lecture complète du coran, la visite des lieux, les prières sur les morts et le recueil des différents témoignages.

A cet effet, plusieurs intervenants ont tenu un discours de témoignage sur cet inique événement.

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Prenant la parole, le président de l’IRA, Biram Ould Dah Ould Abeid a affirmé que : « Aujourd’hui nous sommes là, cette place sur laquelle nous sommes debout, est le lieu où le 28 novembre 1990,  vingt huit officiers et sous officiers, marins et militaires mauritaniens ont été tués pour la seule raison qu’ils sont noirs et peuls. Le camp militaire qui était construit à cette place, a été détruit pour faire disparaitre toutes traces où sont enterrés les corps des militaires assassinés. Et actuellement ce lieu est transformé en terrain de football par les autorités mauritaniennes, qui n’accordent aucune valeur à la vie humaine. Donc, pour nous le 28 novembre est désormais un jour de deuil. Si Ould Abdel Aziz fête aujourd’hui l’indépendance, nous, nous sommes en deuil et resterons en deuil. Cette journée ne sera plus jamais  une fête pour nous  jusqu’à la fin du monde.  Et nous réitérons que notre combat continuera jusqu’à satisfaction de toutes nos demandes inchallah»

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Quand à Maimouna Sy, représentante de l’association des veuves, elle a eu du mal à contenir ses larmes avant de déclarer :  «Pour moi, c’est vraiment difficile en ce moment de parler sur  ce lieu. Le 28 novembre 1990,  la fête de l’indépendance de notre pays, Maawiya Ould Sidi Ahmed Taya et son gouvernement chauvin ont assassiné 28 soldats negro Mauritaniens pour  fêter l’indépendance, dans la joie et la gaité. Pour nous, c’est tout à fait le contraire. C’est un jour de deuil, de pleurs et d’amertumes. Le deuil, je peux dire qu’on l’a commencé aujourd’hui. Le jour où on a pu nous rendre à INAL pour identifier les tombes, savoir comment ils ont été tué. Aujourd’hui 28 novembre 2011, on n’est là à INAL, qui l’aurait pensé ? Personne en tout cas, pas nous, mais Allah le tout puissant nous a donnés cette occasion. On le remercie  ainsi que le comité d’organisation d’IRA à travers son Président, qu’on n’oubliera jamais. On remercie tous ceux qui ont contribué de près ou de loin à tous ceux qui ont assisté. Désormais, pour nous INAL deviendra un lieu de pèlerinage, à chaque fois qu’on pourra, on viendra ici nous recueillir Inchallah. C’est que c’est hier que des noirs ont été assassinés, mais je sais aujourd’hui que ce n’est pas seulement les noirs, mais tous les fils de la Mauritanie ont souffert dans leur chair. Et la preuve est là devant vous, il y’a toutes les composantes de la Mauritanie avec nous à INAL. C’est par ce que l’être humain est humain, le musulman est musulman. Et on est êtres humains et musulmans. On Remercie Dieu. Si ce n’est pas l’Islam, il allait se passer autrement. Aujourd’hui après 21 ans de lutte, nous venons d’obtenir la première victoire avec la visite d’INAL et le reste viendra Inchallah. La vérité il faut qu’on la sache, pourquoi on n’a tué ces gens là. Ceux qui ont tué sont là à Nouakchott, ils sont dans l’armée, portés à  des hauts grades. Je cite en exemple ceux qui entourent Aziz, le vice président de l’Assemblée Nationale aujourd’hui, Arbi Ould Jiddeïn, c’est parmi les plus grands tortionnaires. Pourquoi ne pas le juger ainsi que les autres ? C’est des êtres humains qu’ils ont tué.  Pour nous, nous considérons que  le président de la République Mohamed Ould  Abdel Aziz est complice, car il couvre les bourreaux qui travaillent dans son gouvernement et en plus au temps d’Ould Taya, il était là sans réagir. Nous connaissons tous les tortionnaires, dont la liste est disponible. On demande à ce qu’une commission indépendante soit mise sur pied le plus rapidement possible, qu’on sache la vérité et que la justice soit faite. On se dit musulman, il y’a la charia, qui dit que celui qui tue un être humain doit être tué.  Mais nous, nous ne demandons pas plus  mais qu’il soit jugé. La Mauritanie n’est pas une exception par rapport au autres pays où on juge les tortionnaires. Merci et la lutte continue »

Mr Mahamadou SY, rescapé du camp de torture d’Inal et  auteur du livre « L'enfer d'Inal ; Mauritanie l'horreur des camps.», qui après avoir rendu louange   Allah  de lui avoir donné la vie aussi longue  pour assister à  cette cérémonie, a affirmé: « Je n’aurais jamais pensé qu’un jour je puisse remettre le pied à Inal. Grace à Dieu puis grâce à votre volonté, votre pugnacité,  grâce à votre persévérance on est tous là aujourd’hui. Comme l’a dit Madame Sy, c’est une victoire dans le combat pour le rétablissement des droits humains. C’est une victoire, c’est une première étape, j’espère qu’il va y’avoir d’autres victoires encore dans ce sens là. Il y’a 21 ans, des choses se sont produites ici. Il y’a eu des gens qui ont saigné ce pays en travestissant  son indépendance la date souveraine de ce peuple. Ces gens, aujourd’hui ont fait du tort à tout le monde. Ils ont fait du tort aux tortionnaires (quand je parle des tortionnaires je parle du camp des tortionnaires et du camp des victimes), ils ont fait du tort aux victimes. Car notre fête d’indépendance n’est plus une fête. Ils ont causé du tort à leurs propres enfants et aux enfants des victimes. J’aime bien à le répéter pour que ça soit entendu par tous.  On est tous d’accord que les gens soient responsables de leurs actes et que les enfants des responsables ne sont pas comptables des actes de leurs parents. Si quelqu’un est indexé parce qu’il est fils de l’assassin ou fils du traitre, lui il n’y est pour rien, il n’est pas comptable de l’action commise par son père. Donc on a blessé tous les mauritaniens. Et aujourd’hui, Je ne peux pas dire que je suis heureux, ni que je suis joyeux, Non pas du tout parce qu’il y’a trop de remontés à la surface des scènes que nous avons vécu. Parce qu’il ne s’est pas passé un jour ou une nuit ici ou une seconde ici sans qu’on entend des cris des pleurs où voir quelqu’un qu’on trainait parce qu’il était mort. Ça s’est passé entre le mois de novembre et le mois de décembre, le temps qu’on a passé ici. On est arrivé ici  à 250 personnes et il en est reparti d’ici seulement 96 personnes. Les 104 personnes sont restées là. Donc je ne peux pas dire que revenir aujourd’hui ici ça me fait plaisir, pas du tout. Mais je me réjouis de voir qu’il y’a des maures, des haratines, des halpoulars, des soninkés et des wolofs ici. Il y’a tout le monde ici. Ça veut dire qu’on peut reconstruire quelque chose ensemble si on veut. Ça c’est un groupe qui ne fait pas peut être que cent ou trente personnes. Le baobab il est grand mais c’est une petite graine qu’on enterre et qui pousse pour donner l’arbre. Donc, aujourd’hui on a semé ça, qui sait qui verra les récompenses de la moisson, peut être que ce sera nous, si on a de la chance, sinon nos enfants en bénéficieront. Je souhaite que cette action que nous venons de faire, puisse contribuer à la solidarité nationale. Et il ne peut pas y’avoir de cohésion véritable, si ce problème là n’est pas lavé. Il faut qu’on passe sur ce problème et qu’on éclaircisse ce qui a été fait, qu’on se dise la vérité. Les responsables qu’ils soient indexés. S’il y’a des sanctions à faire qu’ils soient sanctionnés. Mais sanction ne veut pas dire vengeance. Car on n’a pas besoin de vengeance. On n’est pas là pour la haine. On ne déteste personne. Moi personnellement je n’ai de la haine pour personne, même pour les personnes qui m‘ont torturé. Mais je suis assoiffé et j’ai faim de justice. Je voudrais que la victime puisse venir ici libre se recueillir sur le lieu sans avoir à subir tous les contrôles lorsqu’on venait ici. J’admire votre courage, j’admire cette ténacité parce que vous avez bravé les barrières des policiers, des gendarmes, et vous êtes venus jusqu’à là.  Il faut que cela puisse se reproduire chaque fois et que nous soyons encore plus nombreux les années suivantes. Je reviendrai sur un petit détail, mais je ne reviens pas sur le 28 novembre pour ne pas ouvrir certaines blessures. Ce qu’il faut savoir, est que les gens ont tous rasé ici, il n’y a plus rien. Ces digues que vous voyez là-bas il y’a des briques cassées  qui constituaient la caserne. Ils ont tout poussé pour en faire un terrain de football. Mais c’est la qu’il y’avait la caserne, la base. Ils ont tout démoli pour que la mémoire ne reste pas. Mais avec des gens comme vous, il faut être sûr que rien ne sera oublié. Rien ne sera oublié, ne veut pas dire que rien ne sera pas pardonné. Ça peut se pardonner parce que nous avons une chose en commun. Nous avons une patrie  commune. Parce que le fait de voir ici des maures qui ne sont pas là avec un truc pour torturer, le fait de voir des harratines qui ne sont pas là avec des trucs pour torturer, le fait de voir tout le monde est là, pour se donner la main et réclamer justice, ça me va droit au cœur. Je vous remercie au nom de tous ceux qui sont couchés autour d’ici. »

Et pour terminer, Boubacar Lamtoro Camara, Responsable des orphelins a  déclaré : « Je m’appelle boubacar lamtoro Camara, je suis le président du (COVICIM), Collectif des Orphelins Victimes Civiles et Militaires de 91. Je sus là avec les membres qui m’ont accompagné  jusqu’ici ; ils sont venus célébrer le 28 novembre sous forme de deuil national. Non seulement il y’a les 28 militaires qui étaient  pendus ici mais il y’a aussi d’autres militaires qui reposent ici. Parmi les pendus d’ici, mon père y figurait. Je suis triste parce que mon père a été pendu ici. J’ai de l’émotion avec les différents enfants des martyrs dans les différents camps qui se situent en Mauritanie. Tout ce que l’on veut c’est la vérité et la justice. Et on ne pourra jamais oublier. On ne dit pas qu’on va se  venger, on ne dit pas qu’on a de la haine mais la Mauritanie doit savoir que dans ce pays, nous les enfants nous sommes victimes de la barbarie de l’homme, du système de ségrégation raciale. Le Système d’Etat qui a commis ce mal a oublié que la Mauritanie appartient à deux races : les blancs et les noirs.  Et aujourd’hui nous voulons que le monde entier sache le mal qui a été  fait. Et c’est grâce à ce comité, et surtout à monsieur le Président de l’IRA, Biram Ould Abeid, qui nous a vraiment soutenus. Nous saluons son courage, car Il y’a des gens qui ne sont pas courageux, et qui ont peur de se rendre ici même. Mais nous, nous étions déterminés même si l’Etat ne nous reconnais pas et si nous trouvons le moyen,  nous allions nous rendra ici par A ou par B. même s’il y a confrontation entre nous et l’armée. Car nos papa sont des innocents ».

Beaucoup de personnalités  ainsi que les veuves, en provenance de tous les coins du pays, ont assisté à cette journée mémorable, qui rappelle aux organisations nationales et internationales ce qui s’est réellement passé à Inal.

O. Mbaye

Envoyé Spécial à Inal

 

 

 

Mardi, 29 Novembre 2011 19:17