Encore, une fois, Birame et ses compagnons ont été arrêtés. Face à cette répétition de privation de liberté, il est peut être temps de réfléchir sur une solution qui permettrait de mettre fin aux agissements du pouvoir d’Abdel Aziz.
Pour arriver à ce but, une analyse s’impose. Les derniers évènements au Burkina Faso sont, à ce titre, riches en enseignements.
L’histoire commence par la mort d’un grand homme au regard lumineux. Il s’appelait Sankara. Il avait un rêve pour son peuple et le continent africain en entier. Son intégrité est indiscutable. Mais voilà que les forces des ténèbres ont éteint cette lumière isolée au cœur d’un continent.
Il est inutile de relater, ici, les conditions de sa mort. J’y reviens dans un prochain livre en détail. La leçon que je voudrais retenir de cette histoire est que l’on peut tuer un homme mais pas un peuple. Ainsi, l’histoire me donne raison. La population burkinabé en a fait la démonstration.
Aujourd’hui, l’assassin de Sankara a été chassé du pouvoir par une masse et a fui comme une antilope face à des lions affamés. Ici, ce sont des hommes qui ont soif de justice qui se sont révoltés.
Ce qu’il faut comprendre est que la force d’une nation réside dans son peuple. Hegel disait que les peuples ont les chefs qu’ils méritent. Mahatma Gandhi disait aussi qu’un peuple n’est jamais une victime innocente. Il est toujours, en partie, responsable de sa domination.
Le problème de Birame et de ses compagnons est leur isolement. En Mauritanie, la conscience de la justice n’est pas partagée. Même ceux, pour qui, lutte L'Initiative pour la Résurgence du Mouvement Abolitionniste en Mauritanie (IRA) ne partage pas avec elle la conscience de la liberté.
En dehors de cela, les populations autres que les Harratine, c'est-à-dire négro-africaines et maures ont un mépris pour les esclaves arabo-berbères.
Ainsi, le travail qui doit être fait est celui de la conscientisation des masses en vue de leur engagement massif dans une lutte. Car, seule une masse significative peut faire fléchir le pouvoir mauritanien. Tant que l’on ne changera pas les mentalités, les classes dominantes maures, féodales négro-africaines et les opportunistes vont tout faire pour maintenir le système.
Récemment, au cours d’une discussion, j’ai entendu dire de la part de négro-africains que Birame est un vaurien et ne mérite pas un soutien. Comment dans de telles conditions peut-on avancer. Les Mauritaniens sont habités par une conscience inégalitaire. Quels que soient les reproches que l’on pourrait faire à Birame, sa lutte est juste.
Il ne peut y avoir une avancée en Mauritanie que par une prise de conscience collective, le combat de l’IRA est celui de tous et doit être celui de tous..
Toutes les luttes en Mauritanie sont minées par la problématique de la féodalité. Elle sème, au sein même, des mouvements négro-africains une zizanie.
D’une manière générale, ce que n’ont pas compris ceux qui s’agitent sur la scène politique mauritanienne est que la lutte d’émancipation n’est pas un jeu. Mais une action qui nécessite détermination et réflexion. Souvent ceux qui militent sont plus soucieux de leur apparence que de l’efficacité. Tout le monde pense pouvoir faire la politique, cela témoigne de la médiocrité ambiante dans ce pays. Les dominants ne cèdent que sous la contrainte.
L’amateurisme politique est source de dislocation des communautés. La politique est vécue d’un point de vue corporel. Celui qui n’est pas d’accord avec moi est contre moi ; cela empêche l’unité. Or, un espace politique riche est celui de la diversité des opinions.
Bref, tous les facteurs de division font que l’on peut facilement emprisonner Birame et ses compagnons. La masse est fragmentée et n’est pas rassemblée autour d’idéaux. C’est la subjectivité qui domine.
Les leaders politiques doivent agir pour la naissance de mouvements conscientisés luttant pour une véritable démocratie et non pour la reproduction de la féodalité.
Oumar Diagne
Écrivain Mauritanien