En collaboration avec l’OMS et le Réseau Drépano, l’Association de Soutien aux Drépanocytaire en Mauritanie (ASDM) a célébré vendredi 19 juin 2015, à l’Hôtel Wissal, la Journée mondiale de lutte contre la drépanocytose.
Cette année le Réseau International de lutte contre la Drépanocytose a choisit comme thème : « PLAIDOYER POUR UNE MEILLEURE PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR CHEZ LES DREPANOCYTAIRES »
L’ouverture officielle a été lancée par le chef de mission au ministère de la santé, Mr Ahmed Jiddou Ould Zein, précédée d’une introduction de Dr Zombri de l’OMS, qui a affirmé que « l’OMS sensibilise la communauté Internationale sur la conscientisation et la prise en charge des malades drépanocytaires ». Dr Zombri a renouvelé le soutien de son institution à l’Association de Soutien aux Drépanocytaire en Mauritanie (ASDM), dans le combat qu’elle mène.
Dans son discours d’ouverture, la Présidente de l’ASDM, Madame Mariam Wane a souligné que « La lutte contre la Drépanocytose présente de multiples et cruciaux enjeux. C’est soigner et tenter de soulager la douleur des patients. C’est favoriser le diagnostic. C’est fournir des matériels de soins et de traitement. C’est aussi et surtout informer les populations, les familles, les malades, les personnels de santé sur les symptômes, les origines et les modalités de prise en charge d’une maladie mal connue et sur laquelle les erreurs de diagnostics et de traitement s’avèrent mortelles».
Evoquant les douleurs que traversent les malades drépanocytaires, Madame Wane a précisé que « La crise douloureuse est un des signes cliniques majeurs de la drépanocytose. La douleur est un symptôme complexe où le corps et le psychisme s’entremêlent. Cette douleur s’accompagne de manifestations psychiques voire psychopathologiques parfois déroutantes. Ces épisodes douloureux se répètent tout au long de la vie et ce, depuis la petite enfance ».
Mariam Wane a expliqué que l’ASDM a pu organiser à Nouakchott et dans trois autres villes de Mauritanie (Rosso, Boghé et Kaédi), des séances de sensibilisation et de formation sur la prise en charge de la drépanocytose et de ses complications destinées aux médecins, aux enseignants et aux focus groupes. Elle apporte son soutien aux malades par la disponibilisation des médicaments et des vaccins contre les infections. Elle a enregistrée quelques cas de décès liée à cette maladie (5 enfants de 5 à 18 ans). »
Cette année, l’association a également dan le cadre de la célébration de cette journée mondial organisé d’autres activités en parallèles. C’est ainsi qu’elle a organisé le 16 juin, une sensibilisation dans les écoles, pour conscientiser les enseignants. Le 17 juin, elle a animé une conférence à l’hôpital National, présenté par Dr Ndiaye. Et enfin le 18, elle a effectué une séance de sensibilisation au profit des infirmiers et sage femme du centre de soin de Sebkha.
Par ailleurs, la Présidente de l’ASDM a demandé aux autorités mauritaniennes de s’impliquer fortement dans la lutte contre la drépanocytose en mettant en place un paragramme sanitaire de prise en charge, pour les victimes de cette maladie.
« Nous appelons également, la société civile, les medias, les leaders religieux et les intellectuelles à ce joindre à nous dans ce combat si noble et humaniste, puisqu’il s’agit de sauver des vies et de donner espoirs à ceux qui souffre à tout moment dans leur corps et esprit. » conclut-elle.
Créée depuis 2003, l’ASDM est membre d’un réseau dénommée «Réseau drépano», qui est constitué de 6 associations dont la Burkina Faso, la Mauritanie, le Mali, le Madagascar, le Niger et le Sénégal. Ce réseau vise à « sensibiliser l’opinion publique et les dirigeants sur la question de la drépanocytose pour que celle-ci figure dans les priorités de santé publique, apporter des réponses aux malades et à leurs familles grâce au partage d’expériences à à l’appui mutuel, afin d’améliorer le quotidien des malades. »
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Témoignages sur les douleurs du drépanocytaire :
Anta Ndiaye : "Le Médecin m’a dit de ne pas avoir peur"
«Je ne connaissais pas la drépanocytose. L’âge de 6ans mon premier enfant est tombé malade, je lai amené à l’hôpital et le médecin m’a demandé de faire des analyses et après les résultats j’au su qu’il était drépanocytaire. Je ne peux pas exprimer ce que j’ai ressenti lorsqu’il me l’a annoncé. Le Médecin m’a dit de ne pas avoir peur et qu’avec un bon traitement l’enfant vivrait bien avec sa maladie. Quand ma fille a une crise, personne ne dort à la maison à cause de ses douleurs. Elle a tellement mal que j’ai l’impression que la douleur va l’emporter à chaque minute. Je fais tout ce que je peux pour que la douleur se calme à l’instant même, mis malheureusement c’est rare le cas. C’est la chose la plus horrible que je ne souhaite pas vivre. La douleur est tellement intense que parfois je ne supporte pas de rester à ses cotés »
Diallo Moussa : "En période de crise, personne ne peut l’approcher"
« Au début je ne voyais pas ce qui m’attendais de cette pathologie. Par la suite, j’ai eu un sentiment de culpabilité. Et j’en voulais à certains parents qui ne m’ont jamais parlé de cette maladie depuis mes ancêtres. J’ai appris la nouvelle par une sœur du corps médical, quand elle vu l’électrophorèse de mon épouse qui était AS. Elle lui a dit que cette maladie est dans notre famille. Donc on m’a soumis à un examen pour confirmer le statut. J’étais AS et malheureusement l’enfant faisait ses premiers signes mains et pieds.
Au début, les crises que mon enfant subissait étaient abdominales et osseuses. Les yeux jaunes, les pleurs ne cessaient et quoi faire car nous étions novice face à un enfant qui se torde de douleurs. Alors la pédiatrie est devenue notre second domicile. Il souffre de lithiases biliaires de plus de 13mm et malheureusement il est de groupe sanguin AB négatif. Il souffre d’arthrose de hanche et peut à peine marche. Il développe une cardiomégalie et son taux hémoglobine n’atteint jamais 6g.
En période de crise, personne ne peut l’approcher, il pleure de douleurs et souvent il demande qu’on lui injecte le TRABAR au risque de mourir de surdose. Il est souvent agressif mais je lui suis reconnaissant car je sais les degrés de la douleur chez un drépanocytaire. »
Ndeye Fatou Ly à propos de sa fille Jidath : "j’étais carrément abattue"
« Ma fille Jidath fait un premier AVC en mars 2003 avec un Hématome au niveau du cerveau et une paralysie du coté droit. Elle fut hospitalisée à maintes reprises à Nouakchott et à Dakar. Elle avait commencé des séances de kinésithérapie et en septembre elle a refait un autre AVC.je l’ai amené à l’hôpital Rabat au Maroc et c’est là-bas qu’on m’a annoncé la triste nouvelle.
Quand j’ai su qua ma fille Jidath était atteinte de cette maladie, j’étais carrément abattue. C’est alors que j’ai fait pour les autres et j’ai découvert qu’ils étaient atteints. J’ai cru que le ciel allait me tomber sur la tète.
«La plus douloureuse crise de Jidath, c’était en 2004. J’avais rendez-vous avec le pédiatre de l’hôpital national à Nouakchott et arrivé là-bas, elle a piqué une crise et avait une forte fièvre. Ils lui ont administré du valium mais sans effets. Elle a été hospitalisée immédiatement mais sa fièvre n’arrivait pas à descendre. 5 jours après, elle avait les yeux complément jaunes et son état s’est aggravé. Elle avait perdu l’usage de la parole et elle n’arrivait plus à retenir se selles et ses urines. Je la nettoyais constamment et ma mère m’a conseillé de lui mettre des couches. Elle était inerte et c’est à peine si on pouvait entendre sa respiration. Je ne savais plus quoi faire et je me suis mise à pleurer. C’était trop dur de regarder cet enfant souffrir sans pouvoir rien faire. Heureusement que ma mère m’a soutenue sinon je n’allais pas m’en sortir. Elle fut hospitalisée à l’hôpital Albert Royer de Dakar pendant deux mois. Mais à sa sortie, nous sommes restées à Dakar pendant un an pour ses rendez-vous mensuels car je ne pouvais pas faire les va et vient parce qu’elle était devenue complément paralysée avec ses bras repliés au niveau des coudes. »
Guet Seye : "peu de médecin mauritaniens connaissent cette maladie."
« J’ai appris que j’étais atteint de drépanocytose lors d’un arrêt de grossesse. J’avais des maux de ventre, des douleurs dans les membres inférieurs et supérieurs qui me faisaient tellement souffrir que je ne pouvais plus me tenir debout.
Je ne peux pas décrire les douleurs. Ce sont des maux de tête, des maux de ventre, des douleurs dans les membres supérieurs et inferieurs, au final tout le corps me fait mal. En cas de crise je me rends à l’hôpital mais le personnel soignant ignore ce dont j’ai besoin pour calmer les douleurs puisque peut de médecin mauritaniens connaissant cette maladie. Mes proches me disaient souvent que je suis maladive et que je ne suis pas capable de faire certaines choses. Au travail, les collègues me disent qu’il faut me remplacer puisque je suis toujours malade. Seuls ma mère et mon mari savent que je suis drépanocytaire. Je suis très découragée et j’ai peu d’espérance d’aller mieux. Grâce à l’association nous reprenons espoir d’un accès aux médicaments et aux vaccins ».
Oumar Amadou M'baye