Quels mobiles occultes expliquent l’effervescence dans la Vallée ? |
Personne ne doute que manifester pacifiquement est un droit légitime garanti par les lois et règlements en vigueur sur toute la planète et il ne fait aucun doute que le premier droit essentiel de la personne est le droit à la nationalité et à l’appartenance à un pays donné. Ce sont-là des évidences qui ne prêtent à aucune équivoque. Mais ce qui se passe depuis quelques jours dans les villes de Kaédi et certaines autres localités de la Vallée (Sélibaby, Maghama) ne ressemble en rien, malheureusement, aux protestations pacifiques ni aux revendications populaires légitimes. Pire cela suscite de nombreuses interrogations quant à la motivation réelle des manifestants ainsi que l’objectif du mouvement de protestation. Il est peut être naïf de la part de ceux qui brandissent le slogan « Touche pas à ma nationalité » d’imaginer que quelqu’un puisse croire que toute cette violence, tout ce chaos, et tous ces actes de vandalisme sont une réaction à une opération d’enrôlement des populations qui plus est encore à ses débuts et dont la composante négro-mauritanienne en est la moins affectée. Naïf celui qui croit - un seul instant- que les évènements qui se déroulent à Kaédi, à Maghama et ailleurs, ont pour origine le recensement, même si par ailleurs les nombreuses défaillances qui ont émaillé l’opération d’enrôlement constituent des facteurs à risques, propices à ce qui s’est passé. Le mouvement connu sous l’appellation « Touche pas à ma nationalité » est apparu à l’extérieur de la Mauritanie, voire du continent africain. Il est apparu pour la première fois en France à travers des marches et des rassemblements dont le plus violent est le sit-in organisé devant notre ambassade à Paris au cours duquel la pancarte de notre chancellerie a été détruite. Puis sa première apparition à l’intérieur du pays a eu lieu dans la moughataa de Sebkha avant que le mouvement ne s’étende au cœur de Nouakchott, puis Rosso, ensuite Kaédi, Sélibaby et Maghama. Naïf celui qui imagine –même un seul instant- que les véritables fils de ce pays issus de la communauté négro-mauritanienne peuvent s’attaquer aux symboles de la Mauritanie qui est leur Patrie et le berceau de leur civilisation, ou qui croit qu’ils pourront mettre à feu et à sang ces symboles qu’ils ont contribué à façonner avec leurs autres compatriotes avec qui ils partagent le même destin. A celui qui tente de se leurrer lui-même –avant de tromper les autres- en essayant de nous faire croire que la théorie du complot est un slogan révolu, voici une série d’interrogations qui permettent d’appréhender toutes les dimensions de ce mouvement controversé : 1. Que signifie le choix de la journée du samedi au détriment des autres jours de la semaine, notamment le vendredi, pour organiser des manifestations ? Surtout si l’on sait que la journée du vendredi est un jour férié, durant lequel toutes les manifestations de protestation sont généralement organisées dans notre pays et dans les autres pays arabes et islamiques y compris le Sénégal voisin, alors que le samedi est une journée sacrée pour les juives ! 2. Pourquoi les initiateurs de ce mouvement insistent afin que leur manifestation revête un caractère ethnique alors qu’il existe parmi l’autre communauté arabe des victimes affectées par la même opération, peut être même plus que leurs frères noirs ? 3. La concordance du déclenchement de l’étincelle qui a enflammé la ville de Kaédi avec une déclaration de l’ambassadeur israélien expulsé de Mauritanie, dans laquelle il déclare littéralement que « la décision prise par la Mauritanie de rompre les relations avec Israël a été une grave erreur commise par Ould Abdel Aziz", ajoutant sur un ton menaçant et frisant l’insolence : « je suis convaincu que Ould Abdel Aziz découvrira un jour qu’il a commis une erreur impardonnable" ... S’agit-il d’une simple coïncidence ? 4. L’ancien président Ould Taya avait été contraint de nouer des relations diplomatiques avec l’entité sioniste pour clore le dossier du passif humanitaire et couper ainsi l’herbe sous les pieds de ceux qui l’accusaient d’en être le premier responsable à savoir les leaders du mouvement des Flam et les victimes des évènements de 89-90. Ce qui a laissé l’impression dans les esprits de tous les Mauritaniens, Arabes et Noirs que le dossier des droits de l’homme et du passif humanitaire est géré à partir de Tel Aviv ! C’est dire que la rupture par l’actuel président Mohamed Ould Abdel Aziz des relations avec Israël et l’expulsion de leur ambassadeur de Nouakchott est considéré par Tel Aviv comme une violation du contrat de normalisation signé avec Ould Taya. En conséquence, Israël se réserve le droit de raviver le vieux dossier, même si c’est sous un angle différent ! 5. Qu’est ce qui fait craindre aux négro-mauritaniens de perdre leur mauritanité alors que des milliers d’expulsés ont été insérés dans la fonction publique et au sein de l’Armée, d’autres ont perçu leurs pensions de retraite, de même que les veuves et orphelins ont été indemnisés et la prière de l’absent a été accomplie (dans la ville de Kaédi même) à la mémoire de ceux qui ont péri au cours de cette période douloureuse. Par ailleurs, une loi relative à la localisation des sépultures de tous les disparus mauritaniens depuis l’indépendance du pays à nos jours dans des circonstances mystérieuses, a été promulguée en réponse à une requête insistante des militants des droits de l’homme et des ayants droits ? 6. Qu’est ce qui poussent ceux-ci à commettre des actes qui n’ont rien à voir avec le patriotisme ni l’appartenance réelle à ce pays ; des actes répréhensibles comme la mise à feu d’un tribunal qui incarne la primauté du droit, ou encore d’attaquer des éléments des forces de l’ordre qui sont le symbole de l’Etat et qui sont chargés de veiller à la sécurité du pays et du peuple tout entier ? 7. Qu’est ce qui les pousse à saccager les biens de leurs compatriotes (si tant est qu’ils sont mauritaniens) et à piller les biens des fils de leur patrie et de leur ville, si tant est qu’ils soient des ressortissants de ce pays et de cette ville ? 8. Comment de réels négro-mauritaniens peuvent-ils s’en prendre au régime du président Mohamed Ould Abdel Aziz, lui qui a satisfait l’ensemble de leurs doléances, y compris celles dont ils ne rêvaient même pas qu’elles pouvaient se concrétiser ? Lui qui a inauguré l’opération d’enrôlement des populations qui soulevé tout ce bruit et toute cette fureur, en s’enregistrant lui-même dans la moughataa de Sebkha, avec toute la charge symbolique que revêt ce geste dans ce contexte ? Lui, durant le régime duquel des officiers supérieurs noirs appartenant à la même wilaya ont occupé –pour la première fois de l’histoire du pays- les postes stratégiques de trois des plus importants états major des forces armées nationales (Etat major particulier du président de la République, état major de la Garde nationale et état major de la Gendarmerie nationale) ? On pourrait soutenir que des mains étrangères hostiles à la Mauritanie et aux mauritaniens pourraient réussir à embrigader quelques éléments basés à l’étranger qui font du dossier humanitaire un fonds de commerce, mais ne pourraient en aucun cas réussir à mobiliser avec cette ampleur la jeunesse des villes mauritaniennes. Cet argument ne résiste pas face à une autre vérité qui est l’entrée en jeu de certains acteurs politiques dont des élus de la Vallée menacés de perdre leur poste lors des prochaines consultations électorales. Il n’est pas à exclure que ces élus soient à l’avant-garde de ceux sur lesquels ont misé les forces étrangères malveillantes. Ceux-là mêmes que certains leaders de la communauté noire mauritanienne n’ont pas hésité à pointer du doigt comme étant les instigateurs des évènements qui se sont déroulés à Kaédi. Il va sans dire que ces politiciens désespérés de ne pouvoir renouveler leur mandat en raison d’un état de civil assaini, entretiennent des relations nourries avec les milieux étrangers les plus « généreux » en termes de recrutement de mercenaires, de pions et d’instigateurs de conflits et de guerres civiles. La cupidité de ces acteurs politiques, ainsi que leur soif pour les avantages et privilèges matériels, les a incités à embrigader les fils de Kaédi et à les pousser à commettre des actes dont ils ignorent la gravité pour eux-mêmes d’abord et pour leur pays ensuite ; et à les pousser également à attaquer les forces de maintien de l’ordre avec des pierres, des bâtons et des armes blanches, les exposant ainsi au péril comme si le sang des fils de cette zone était la contrepartie de ce qu’ils percevront outre-frontières, ou si ce sang constituait le tapis rouge à emprunter forcément pour entrer dans les couloirs des luxueux hôtels et palaces en Europe et en Amérique ! Les récents évènements ont révélé l’existence d’éléments qui tentent de ramener la Mauritanie vers les sombres années de braises. Ces éléments font de la misère des autres un fonds de commerce fructueux. Plus encore, ils ont révélé également l’absence d’un rôle pivot que devraient jouer les différentes composantes de l’élite nationale en matière de promotion de la cohésion sociale, de resserrement des rangs des mauritaniens dans un esprit de solidarité, de fraternité, de non discrimination et de rejet de division. Il aurait été souhaitable que les illustres Oulémas mauritaniens, à leur tête les oulémas et imams de la Vallée, prémunissent, par la prédilection et l’enseignement de la Sunna du prophète (PSL), notre jeunesse contre la propagande de ceux qui prônent la sédition et contre les partisans de la violence et de l’extrémisme. Il aurait été souhaitable que notre classe politique, de la majorité comme de l’opposition, descende sur le terrain, prenne contact avec le peuple pour l’orienter vers la bonne direction, loin de la division et de la discorde, au lieu de se contenter de publier des communiqués à partir de chambres climatisées closes à Nouakchott ; des communiqués qui contiennent la même litanie de « condamnation de la répression ». Il aurait été plus profitable que notre société civile profite de l’occasion pour se débarrasser de l’étiquette lucrative, contraire à ses textes de base, et de rompre avec certaines ONG étrangères aux objectifs généralement non avoués. Il aurait été beaucoup plus profitable à nos intellectuels, de toutes les composantes du pays, d’éviter de s’inspirer des idéologies caduques et de se débarrasser de la malédiction des appartenances étroites destructrices (nationaliste, ethnique, tribale, clanique, etc.). Leur devoir et leur raison d’être, est de promouvoir le patriotisme, d’enraciner la culture citoyenne, en pratique et en théorie. Nos journalistes et écrivains devraient se libérer de l’idée de suivre aveuglément les idées propagées par certaines chaines de télévision et stations radio étrangères, ou ce que colportent certains prétendus experts ou analystes sur les pages de facebook ou twitter ainsi que les colonnes de certains journaux et pages de sites d’information électroniques. Ces journalistes et écrivains devraient plutôt se rendre sur le terrain et transmettre les évènements tels quels, au lieu de jouer à la science fiction en cherchant à transposer des reportages portant sur d’autres évènements et d’autres peuples différents, sur ce qui se déroule chez nous à Kaédi, Maghama ou Nouakchott. Nous assumons tous –chacun en ce qui le concerne- une part de responsabilité dans la préservation de la cohésion de notre peuple et le rejet du spectre de la guerre civile et des conflits dans notre pays, car il n’y aura ni nationalité, ni état civil, ni libertés publiques en cas de violence, de désordre et de confrontation. Mohamed Brahim Ould Sidi (Traduit de l’arabe par la MEPIPS) source : le veridique |
Samedi, 01 Octobre 2011 11:25 |