En début de mois, l'Association mauritanienne de protection des consommateurs a tiré la sonnette d'alarme pour mettre en garde contre une famine possible dans le pays en raison du manque de pluies.
"De forts indicateurs montrent qu'il y aura une pénurie sévère dans les stocks de blé de l'Etat mauritanien en raison de la sécheresse actuelle résultant du manque de pluies", a expliqué l'organisation le 4 octobre dans un communiqué. "Cela signifie que les éleveurs vont "utiliser le fourrage" pour leurs cheptels, parce que c'est le seul moyen de secourir des millions de têtes de bétail menacées".
L'association a également noté une hausse du prix du blé sur les marchés mauritaniens, qui atteint dorénavant 120 000 ouguiyas la tonne, et elle redoute que ce prix aille jusqu'à atteindre 200 000 ouguiyas.
"A la date du 1er octobre 2011, le déficit pluviométrique dans certaines régions de Mauritanie est estimé à 70 pour cent par rapport à la même période de l'année précédente", selon l'économiste Mohamed al-Amin Ould Ammar. "Dans d'autres régions, il atteint parfois 45 pour cent, et a même été de 90 pour cent dans certaines zones classées comme sinistrées".
"Les pluies intermittentes dans certaines régions, leur retard et leur rareté dans d'autres, ont causé la mort de 40 pour cent du bétail dans les provinces de Hodh Ech Chargui, Hodh El Gharbi, Assaba, Trarza, Brakna et Guidimaka", explique Ould Ammar. "De plus, ces faibles précipitations n'ont pas permis aux habitants de ces régions de planter les semences à l'automne, alors même qu'elles pourraient constituer pour eux une alternative ; tout cela laisse à penser que nous pourrions assister à une catastrophe touchant les populations et les cheptels dans toute la Mauritanie".
L'analyste Abdul Moemen a expliqué que le Programme alimentaire mondial estime le nombre de Mauritaniens menacés par la famine à près de 900 000, et qu'il est probable que ce chiffre s'élevera encore. Il a également mis en garde contre une hausse du terrorisme consécutif à cette situation, dans la mesure où "le terrorisme se répand dans des lieux où règnent la pauvreté et la famine, parmi les bergers bédouins et les pâtres".
D'autres, comme Mohamed Abdullah Ould Maham, affirment redouter une répétition de la crise du pain de 1998. "Il est très probable que nous assisterons à une augmentation considérable du prix du pain, parallèlement à une baisse de sa qualité", a-t-il déclaré. "Des informations circulent même, selon lesquelles certaines boulangeries de Nouakchott utilisent des farines de mauvaise qualité, au vu des prix élevés des bons types de farine et de l'absence de contrôle exercé sur ces commerçants".
Pendant ce temps, les citoyens et les marchands présents sur le marché aux céréales de Nouakchott expriment leurs inquiétudes face au spectre d'une possible famine à venir.
"Ce qui nous préoccupe le plus, c'est la rareté du fourrage sur les marchés de Nouakchott", a ainsi expliqué à Magharebia Sidi Ould Oudaa, un commerçant. "Cette période est habituellement connue pour la faible demande de fourrages, en raison de la saison automnale, mais au vu du faible niveau des pluies cette année, l'absence de fourrage est inquiétante et se fait sentir pour les bergers".
Salimou Ould Mohamed, un habitant de Nouakchott, indique avoir constaté une augmentation notable dans les prix des produits alimentaires. "Mais on espère qu'ils redescendront bientôt. On est habitués à l'instabilité de ce marché, dans la mesure où il est sensible à l'offre et à la demande".
"Le problème, c'est que quelques gros commerçants contrôlent les prix des produits de consommation", ajoute-il. "Ils ne livrent intentionnellement que des quantités limitées d'approvisionnement, et retiennent le reste dans le but d'imposer le prix qu'ils veulent". "Depuis deux semaines maintenant, le marché connaît une pénurie visible de farine", conclut-il.
Magrebiya |