'Touche pas à mon chef de file de l'opposition' Résultats du dialogue : Mention Médiocre selon la COD |
" Les résultats du "dialogue" mené par le régime et sa majorité avec certains partis d'opposition ne comportent aucunement les réformes de nature à rompre avec les régimes autocratiques et instaurer un système démocratique véritable, ni les mesures qui permettraient de désamorcer la crise politique en Mauritanie. " C'est en ces termes que les partis de la Coordination de l'Opposition Démocratique ont réagi aux résultats des assises nationales pour le dialogue politique, assises dont les travaux ont été clôturés mercredi 19 octobre 2011 au centre international des conférences de Nouakchott. Les formations de la COD, qui avaient boycotté le dialogue, ont critiqué plusieurs points retenus à l'issue de cette rencontre d'un mois qui a vu la participation de l'APP de Messaoud Ould Boulkhier et d'autres partis d'opposition face aux partis de la majorité présidentielle. La CENI, un bras docile du pouvoir Selon ces partis de la COD, qui intervenaient à la faveur d'une conférence de presse tenue samedi à Nouakchott sous la présidence de Mahfoudh Ould Bettah , Président en exercice de la coalition, le point concernant la Commission Electorale Nationale Indépendante ne permet pas à cette structure d'être effectivement indépendante et crédible car " les " dialogueurs " l'ont doublée d'une Direction Générale des Elections rattachée au Ministère de l'Intérieur et chargée des questions de procédure ". Ce qui signifie selon la COD que le régime veut toujours disposer d'un bras docile pour piloter les élections. Le BASEP toujours sous les ordres d'Ould Abdel Aziz Sur le point relatif à la criminalisation des coups d'Etat militaires, le communiqué de la COD note que " initialement prévue par le Code pénal, elle a perdu toute sa valeur devant l'apologie de ses putschs successifs dont Mohamed Ould Abdel Aziz s'est pourfendu dans son discours de clôture du "dialogue". " En outre, le document n'a pas abordé le problème du BASEP que Mohamed Ould Abdel Aziz continue toujours à commander, en violation des lois militaires et du prestige de l'armée mauritanienne. " Les leaders de la COD ont également relevé dans le communiqué distribué à la presse qu'il n y avait pas de garanties fiables de la neutralité de l'institution militaire et son impartialité dans le jeu politique, " sachant que la crise que vit le pays trouve son origine dans la consécration du régime militaire et l'immixtion flagrante de certains des chefs de l'armée dans l'action politique. " Au cours de la conférence de presse, Saleh Ould Hanana tournera en dérision la criminalisation du coup d'Etat en affirmant qu'il s'agit d'une mesure qui ne fait qu'enfoncer les portes ouvertes. Rappelant que toutes les conventions internationales interdisent de facto cette forme de prise de pouvoir, l'ancien putschiste de juin 2003 dira que " tout celui qui fait un coup d'Etat est conscient de faire une chose interdite et sait qu'il s'expose à deux situations : soit réussir son coup de force et devenir un héros, soit le rater et passer pour un criminel et un bandit aux yeux de l'opinion." Même réaction d'ailleurs de Mahfoudh Ould Bettah, de la Convergence démocratique nationale pour qui "on n'a pas besoin de réforme pour dire que le coup d'Etat constitue un crime". Surtout, explique-t-il, que le code pénal mauritanien, notamment en ses articles 83 et suivants prévoit des peines sévères, allant jusqu'à la peine capitale pour les tentatives de coup d'Etat. La HAPA politisée A propos de la Haute Autorité de la Presse et de l'Audiovisuel, l'opposition boycotteuse du dialogue trouve que l'option de la représentation en son sein de l'opposition relativement à sa représentativité à l'Assemblée nation vise à la politiser de sorte à lui faire perdre l'indépendance et la neutralité qui en faisaient la raison d'être et que la loi l'instituant avait consacrées. Sur un tout autre registre, " malgré leur importance, l'introduction dans la Constitution de la criminalisation de l'esclavage et d'autres questions nationales ne suffit pas pour camoufler l'incapacité du régime ou son refus d'appliquer les lois sanctionnant le crime odieux de l'esclavage et d'autres pratiques qui menacent l'unité nationale et la cohésion sociale ", souligne la COD dans son communiqué avant de noter que " les autres amendements constitutionnels n'apportent rien de nouveau, n'ont pas eu d'incidence sur les pouvoirs concentrés dans la main du Président de la République et n'ont pas donné de prérogatives nouvelles au Parlement, ni au Premier ministre. La justice, elle, n'a eu droit qu'à un seul paragraphe qui ne change rien à la situation. "
Diversité culturelle instrumentalisée Au cours de la conférence de presse qu'il présidait samedi, Me Ould Bettah est revenu sur la question de la reconnaissance de la diversité culturelle, du droit à la différence et du refus de l'esclavage. Selon lui, cette mention, bien que positive, n'a pas besoin d'une disposition constitutionnelle. Elle doit plutôt faire l'objet de correction d'une situation faisant que " nos compatriotes de la vallée n'ont pas le sentiment d'être des citoyens à part entière. " Dira, l'ancien ministre de l'ère de transition 2005-2007. Pour lui, les mauritaniens n'ont pas de problèmes culturels entre eux mais des problèmes de citoyenneté, des problèmes de sentiment d'appartenance à un pays ; problèmes dont les solutions consistent à mettre fin au régime autoritaire, au despotisme, à l'instrumentalisation de nos différences culturelles et du pouvoir personnel. Par rapport à l'esclavage, le président de la COD trouve qu'il n'est pas inintéressant de porter, sur le plan des principes, au niveau de la constitution, la condamnation de cette pratique inhumaine et dégradante. " Je rappelle, a-t-il souligné, que le problème n'est pas un problème de principe mais d'application des lois de l'Etat. Cette pratique a été déjà criminalisée par une loi spécifique. Mais cette loi n'est pas appliquée. Il faut donc appliquer les lois de l'Etat pour que nous puissions un jour éradiquer l'esclavage." 'Touche pas à mon chef de file de l'opposition' Autre point abordé, le statut du chef de file de l'opposition. Dans la première mouture de l'accord, ce statut était resté intact. Mais dans a version définitive de l'accord entre opposition et majorité, il a été apporté la mention selon laquelle : " le chef de file (de l'opposition) doit être obligatoirement un maire, un député ou sénateur. " Et Ould Bettah de trouver que lier le poste de chef de file de l'opposition à un poste électif a des relents de règlement de compte. Selon lui, Ahmed Ould Daddah, contre qui cette disposition semble être prise, a obtenu 47% des voix des mauritaniens lors de la Présidentielle de 2007 ; score qui conférait, aux yeux du président de la CDN une réelle légitimité au candidat malheureux des présidentielles de 2007 puis de 2009 face à Sidi Ould Cheikh Abdellahi, d'abord et à Mohamed Ould Abdel Aziz, ensuite, pour être chef de file de l'opposition démocratique. En conclusion les partis de la COD ont déclaré s'être préparés à saluer les résultats de ce "dialogue" s'ils avaient comporté de quoi mettre fin à la crise et sortir le pays de l'impasse politique et des risques de dérapages qui lui sont liés, tiennent à exprimer leurs regrets pour les résultats insignifiants qui ont émané de ce dialogue, et que le Président Mohamed Ould Abdel Aziz n'a même pas daigné gratifier ses partenaires et ses applaudisseurs de bonne foi d'un engagement de les respecter. " En définitive, selon les partis et formations de la COD " le pays a besoin d'un vrai dialogue sérieux et responsable, susceptible de déboucher sur des mesures concrètes et significatives pour sortir la Mauritanie du cercle vicieux des coups d'Etat militaires et des régimes autocratiques. " CR Feinda Traoré La Tribune N°570 du 24/10/11 |
Lundi, 24 Octobre 2011 11:26 |