L’excision, une pratique vulnérable à bannir ! |
Considérée comme incontrôlée et insatiable, la sexualité de la femme a toujours fait l’objet de nombreux contrôles et cela que ce soit dans la société traditionnelle, surtout, que celle moderne. Ainsi, pour ce faire, dans certaines sociétés, on fait appel à la ceinture de chasteté, dans d’autres, à l’infibulation (désinfibulation et réinfibulation : on coud le vagin à chaque fois, par exemple, que le conjoint part en voyage et, le découd quand il est de retour et ainsi de suite... L’infibulation est la troisième forme de l’excision appelée, aussi, la circoncision pharaonique où out le clitoris est ablaté et le tout cousu laissant la place à l’écoulement des urines et des menstrues), dans d’autres encore, à l’excision… Ces différentes pratiques ont constitué ou constituent toujours des normes sociales pour certaines sociétés. Quant à l’excision - – qui est l’objet de cet article, il est noté qu’elle a occupé ou occupe encore une place très importante dans de nombreuses sociétés.
Dans certaines sociétés, elle a été ou est une étape initiatique marquant la différence fondamentale entre une fille (fillette) et une femme en ce qu’elle la purifie et la classe dans le groupe des adultes et cela quelque soit son âge. Par là, il est important de rappeler que dans ces sociétés, même si la ‘‘fille’’ a trente ou cinquante ans, par exemple, tant qu’elle n’est pas excisée, elle est considérée comme étant ‘’mineure’’ et ‘‘impure’’ au même titre qu’une fille ou fillette (non excisée) de cinq ou dix ans. Ce point s’explique par le fait que ces sociétés font de cette pratique un fait social. Or, qu’est-ce qu’un fait social ? Selon le père fondateur de la sociologie, Emile Durkheim, les faits sociaux sont des manières de penser, de voir, de sentir et d’agir, extérieures aux individus et qui s’imposent en eux en un pouvoir de coercition. A travers cette définition, Durkheim met en lumière quatre caractéristiques des faits sociaux qui sont : la collectivité, l’extériorité, la contrainte et la stabilité (l’hérédité).
Ce basant sur cette définition des faits sociaux, il est à retenir que l’excision, en tant que fait social ‘‘héréditaire’’, est, aussi bien, ancrée dans le conscient et l’inconscient des groupes qui la pratiquent. Ainsi, intériorisée et inculquée en eux par le biais d’une solide éducation et socialisation, les groupes concernés excisent, à leur tour, leurs filles en croyant, à tord, bien faire.
Or, après la prise de conscience du caractère maléfique de cette pratique et de la mise en exergue de ses conséquences néfastes (par les nombreuses sensibilisations faites sur ce sujet), doit-on continuer à exciser ou à accepter que les filles se fassent exciser ? Certains musulmans, pour pratiquer l’excision et la légitimer, se cachent derrière le voile de l’Islam. Or, cette religion sainte ne cherche à nuire l’être humain - qu’il soit issu du sexe masculin ou féminin. L’Islam, au contraire, permet à la femme tout comme à l’homme de jouir pleinement de sa sexualité d’où l’importance et le sens sacré du mariage. Ainsi, ôter à la fillette ou à la fille une partie du tissu de son organe sexuel, vaginal ou encore clitoridien - partie qui participe à lui procurer du plaisir ou qui lui en procure, ce n’est pas normal, juste. Pratique faite au nom de l’abstinence féminine, c’est-à-dire de la virginité, l’excision se transforme en une douleur qui accompagne, généralement, la victime (l’excisée) durant toutes les étapes de sa vie. De même, il arrive que l’excisée ait le chagrin de ne pas pouvoir jouir pleinement de sa sexualité au même titre que certaines femmes non excisées. Par là, il est important de noter que certaines excisées parviennent, tout de même, à jouir de leur vie sexuelle. Pratique tant choyée par certaines sociétés africaines, l’excision fait des ‘‘ravages’’. Ces ‘‘ravages’’ ou conséquences sont parfois non réparables ou, du moins, difficilement réparables. Parmi ces conséquences, nous pouvons citer, entre autres : la baisse voire la perte du désir ou plaisir sexuel, les douleurs de l’accouchement (dues au rétrécissement du vagin causé par l’excision) pouvant entrainer la mort, les problèmes psychologiques (à ne pas négliger), les conflits conjugaux (énervements, chez la femme excisée, dus à la baisse ou à la perte du désir sexuel et au désir sexuel accru et satisfait chez le conjoint) et les maladies sexuellement transmissibles. Malheureusement, malgré que l’excision soit interdite, et que sa pratique mène à l’incarcération et à la paie d’un dommage, cette pratique vulnérable continue à être appliquée en Mauritanie et dans d’autres sociétés africaines. Ainsi, il est à noter que depuis son interdiction en Mauritanie, l’excision se fait de manière dissimulée (en cachette) et cela empêche, de nos jours, d’avoir et de connaitre le taux (effectif) exact des filles excisées. Cet article n’a pas pour but d’indisposer les victimes mais, au contraire, de véhiculer un message qui s’adresse aux pratiquant(e)s de l’excision (exciseuses et parents). Que ces derniers sachent qu’en excisant leurs filles, ils mettent fin, d’une manière ou d’une autre, à une partie du sens de leurs vies car, celles-ci ont en elles, une plaie qui pourrait ne jamais se cicatriser (‘‘exception faite pour la chirurgie’’ qui n’est pas évidente voire peut-être remise en cause). Cet article n’a pas, non plus, pour but de mener des propos désolants ou impolis mais, plutôt, de parler des choses telles qu’elles sont avec les termes qui corrèlent, correspondent car, comme on dit communément, «il faut appeler le chat par son nom ». Cet article a plutôt pour but d’empêcher les parents du XXIème d’exciser les fillettes, les filles autant plus que les conséquences de cette pratique sont, de nos jour, bien connues. Compte tenu de tous ces paramètres néfastes, nous devons toutes et tous marcher ensembles en criant sincèrement et haut et fort en disant : stop à l’excision ! Stop à cette pratique vulnérable et maléfique ! L’arrêt de cette pratique est indispensable pour l’évolution de toute société car la femme tout comme l’homme doit pleinement jouir de sa sexualité. Personne au monde ne doit le lui empêcher, moins encore, le lui limiter. Ainsi, comme l’a si bien écrit Dr. Habib AFFES dans son œuvre intitulée « Jeunes couples » : « La sexualité heureuse est un art » (Paris, Editions Jeunesse Sans Frontières, 2003, 128 pages). Et compte tenu de cet aspect magnifique et artistique, cette pratique maléfique - l’excision - doit-être bannie par toutes et tous et pour toujours. De même, comme le pense logiquement Montaigne, la sexualité se développe de la même manière chez les deux sexes – homme et femme - qui sont des ‘‘épiphénomènes’’ d’une même libido originelle qui agit à travers eux. Ainsi, étant dans le même ordre d’idée, le Coran nous montre que la sexualité ou, du moins, sa jouissance doit, d’une manière ou d’une autre, être-vécue de la même façon aussi bien chez l’homme que chez la femme. S’agissant de ce point, la fornication et l’adultère peuvent être pris comme exemples car interdits aux deux sexes. Ainsi, à titre d’exemple, le verset coranique suivant en témoigne : « La fornicatrice et le fornicateur, fouettez-les chacun de cent coups de fouet. Et ne soyez point pris de pitié pour eux dans l’exécution de la loi d’Allah - si vous croyez en Allah et au Jour dernier. Et qu’un groupe de croyants assiste à leur punition» (Coran, Sourate 24, Verset 2). A travers ce verset, nous nous rendons compte que la sexualité n’est pas un don exclusivement masculin mais, aussi, féminin d’où l’importance du délaissement de l’excision. A travers ces points, comprenons que l’homme et la femme sont certes différents mais, d’une manière ou d’une autre, ‘‘égaux’’ (sur certains plans tel que la jouissance sexuelle) et complémentaires. Ainsi, si la société mauritanienne veut que ses filles restent vierges jusqu’au mariage, elle doit les éduquer d’une manière convenable sans passer par l’excision. Cela dit aussi qu’elle doit éduquer les jeunes (garçons et filles) sur les vertus de l'abstinence sexuelle et des dangers de la sexualité précoce qui peut constituer une sorte de drogue ou un piège dans lequel il sera difficile de sortir. Autrement dit, la société mauritanienne doit aussi exiger à ses garçons, ses hommes de rester puceaux jusqu’au mariage tout comme cela est exigé chez les filles, les femmes. Ce point rendra fluctueux le développement de toute société. Il est ainsi important de rappeler que les filles excisées ne restent pas toujours vierges jusqu’au mariage comme cela est sollicité par la société. La preuve est que certaines sont enceintes avant les relations maritales... Ainsi, une autre solution doit-être cherchée et trouvée et celle-ci ne peut-être recherchée et retrouvée ailleurs que dans l’éducation de la population juvénile mauritanienne, c’est-à-dire dans une éducation équilibrée et équitable – sans discrimination sexuée. Pour finir, répondant explicitement à la question posée précédemment, je dirai qu’après la prise de conscience du caractère vulnérable et maléfique de l’excision et de la mise en exergue de ses conséquences néfastes, cette pratique doit prendre fin dans toutes les sociétés du monde, notamment dans celles mauritaniennes. Et cela, même si elle fût ou est une norme ou un fait social indispensable et incontournable.
NB : 1. Cet article a été publié pour la première fois dans le magazine Mauritanies 1, N° 17, Du 15 aout au 15 septembre 2011. Titre initial : L’excision, une pratique abominable !!!Haut du formulaire 2. Pour plus d’informations sur ce point, cf., à un article, que j’ai rédigé, intitulé « Pour une éducation sexuelle équitable et équilibrée », au lien suivant : http://cridem.org/C_Info.php?article=644230 Baye Tidiane DIAGANA. Cette adresse email est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir. |
Lundi, 01 Juillet 2013 23:02 |