Interview avec Diko Hanoune sur la perception de l'unité nationale en Mauritanie |
Fr.esssirage.net s’est entretenu avec Mr. Diko Hanoune dans le cadre de l’explication et d’analyse après 53 ans de l’indépendance de la Mauritanie, comment les citoyens Mauritaniens perçoivent cet événement. fr.essirage.net: Après cinquante ans d'Independence, estimez vous que le citoyen mauritanien garde t-il encore les mêmes sentiments vis-à-vis de cet événement national? Diko Hanoune : Je vous remercie de m’avoir donné la parole sur ce sujet après qu’on ait soufflé les 53 bougies de l’existence « l’état Mauritanien ». Je ne pense pas la majorité des citoyens mauritaniens ont le moindre sentiment d’être dans une république indépendante depuis 1960 à nos jours. On est en droit de se demander si nos différents chefs de l’état se sont sentis vraiment à la tête d’un état l’indépendant, nous avons été surtout gouvernés par des hommes dépendant complètement de l’ancienne puissance coloniale quoi qu’on essaye de nous faire croire. Malheureusement nous avons cette malchance d’être gouvernés par des hommes qui n’ont aucune notion de l’indépendance, voyons le sens du mot « indépendance » avant de continuer : « L’indépendance désigne l’absence de relations de cause à effet, d'influence, de contrainte, ou de coordination entre différentes choses ou événements. Pour un pays, une nation ou une collectivité, l'indépendance est l’acquisition de son autonomie, essentiellement dans le domaine politique, ainsi que le fait de ne pas être soumise à une autre puissance. » Premièrement : Le 28 Novembre 1990, 28 soldats noirs mauritaniens sont pendus pour célébrer la fête de l’indépendance de la république islamique de Mauritanie, vous imaginez combien l’acte est grave surtout odieux ? D’autant plus les auteurs n’ont jamais comparus devant une juridiction quelconque, ils bénéficient la couverture totale de l’état Mauritanien, d’autant plus nous avons l’impression qu’ils vivent paisiblement sans regret avec le sentiment d’avoir accomplis leur devoir au service d’une nation ; fort du soutien de celui-ci en pendant 28 de leurs compagnons d’armes dont certains ont défendus corps et âmes le pays à leur côté pendant la guerre du Sahara. Ces hommes qui ont osé souillés la mémoire collective de tout un pays en cette date symbolique restent impunis malgré qu’ils soient connus, pire encore certains sont décorés et dirigent la hiérarchie de l’armée Mauritanienne, d’autres sont considérés comme des icônes au sein de la classe politique en se reconvertissant dans la vie politique alors comment les citoyens Mauritaniens peuvent ils être joyeux à fêter cette journée comme si tout est normal face à des telles horreurs ? Deuxièmement : L’enrôlement des Mauritaniens à l’extérieur confirme exactement ce que je vous disais ci-dessus, vous imaginez, pour avoir le droit d’être enrôlé comme citoyen Mauritanien à part entière, la république islamique indépendante de la Mauritanie exige une carte séjour de l’ancienne puissance coloniale c'est-à-dire la France. Les autorités du pays nous ont mis sous la tutelle de l’ancienne puissance coloniale, on n’a beau présenté tous les papiers Mauritaniens qui ont existé sur terre, depuis la création du pays, ils ne sont pas reconnus, ni valides sauf si vous présentez une carte séjour délivrée par les préfectures de la république Française avec vos documents alors que dire de plus ? Sommes-nous dans un état indépendant où une sous-préfecture de la France ? Personne n’est en mesure de répondre à ces questions sauf le président de la république lui-même. Il nous doit des explications, en tout cas selon son entourage, il a donné des ordres aux diplomates de faciliter l’enrôlement des Mauritaniens à l’extérieur, apparemment c’est son ambassadeur qui est en France qui rend la vie dure aux Mauritaniens de son propre chef. Là aussi nous sommes en mesure de se demander pourquoi le président maintient en poste un ambassadeur qui refuse de se plier aux ordres du président ? Mystère !
Troisièmement : Une bonne partie de nos concitoyens croupissent encore sous l’esclavage depuis avant l’indépendance. Après l’indépendance, leurs conditions se sont dégradées fortement à cause de l’inexistence d’un état de droit. Certains vieux qui ont vécu au temps des colons ont le sentiment profond qu’ils étaient mieux lotis que sous nos dirigeants « nationaux » qui se sont succédé à la tête du pays depuis l’indépendance. Les rebelles esclaves pouvaient fuir leurs maîtres pour aller se refugier ailleurs par exemple au Sénégal dont dépendait la Mauritanie au temps colonial ou dans d’autres régions à l’intérieur du pays, après l’indépendance, ils ont été contraints de rester avec leurs maîtres. Les Adwaba étaient appelés au temps des colons français comme les villages de la liberté pour les esclaves, après leur départ, se sont les chefs de tribus qui ont repris les commandes de ces villages en réinstaurant l’esclavage en vigueur avec la complicité des autorités du pays. Ils ne pouvaient se plaindre nulle part alors que ce n’était vraiment pas l’objectif de l’indépendance. On remarque aussi l’état Mauritanien signe des conventions, édictent des lois qui ne sont jamais appliquées, tout est fait dans l’art de tromper et tricher, un pays ne peut être dirigé sur des mensonges. Malheureusement c’est notre cas actuellement.
fr.essirage.net: Vu le contexte actuel, que pensez-vous des perspectives de l'unité nationale dans les dix prochaines années? Diko Hanoune : Comme dit l’adage, quand on veut, on peut, personnellement je n’ai jamais cru à un instant que nous avons un problème d’unité nationale que certains politiciens classent comme un problème de cohabitation. La Mauritanie est plus confrontée à des dirigeants injustes, dictateurs, véreux qu’autre chose. Notre maladie ne s’appelle pas problème « d’unité nationale ou cohabitation » mais de la mauvaise gestion des affaires publiques. Nos problèmes résident essentiellement sur: les inégalités, le racisme, l’esclavage, la féodalité, le tribalisme etc… qui gouvernent le pays …. Je prendrai l’exemple de mon village natal Gorilakhé dans le guidumakha, département de Ould Yengé, je n’ai jamais vu un boutiquier Maure Blanc agressé parce qu’il était différent de nous. Le peuple ne demande qu’à être bien gouverné, sinon un minimum d’équité puis le reste est un jeu de mots politiques qui sont loin des réalités profondes des Mauritaniens. Je pense que le peuple a compris le jeu du pouvoir plus que nos politiciens, le pouvoir joue la carte de diviser pour mieux régner et nos politiciens le talonnent de prés au lieu de refuser leur jeu. |
Lundi, 30 Décembre 2013 10:11 |