Elections législatives et municipales : Qui des boycottistes ou de Aziz craquera le premier ? |
Comme en 2009, le régime face à une date butoir pour des élections, a reculé. Prévues initialement le 12 octobre 2013, les élections législatives et municipales en Mauritanie ont été reculées jusqu’au 23 novembre prochain. Dans ce bras-de-fer entre une opposition qui tient à ses exigences préalables pour toute participation et un régime qui s’arc-boute sur son intransigeance à maintenir le cap, fort de la participation de certains partis opposants, l’opinion se demande qui craquera le premier, la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD) qui maintient son boycott ou le régime qui tient à faire main-basse sur les institutions parlementaires et communales ? Entre la COD et le régime en place, c’est l’éternel jeu psychologique. Un jeu où jusque-là,Mohamed Ould Abdel Aziz est toujours sorti victorieux. En 2009, il avait maintenu la pression, avant de lâcher un petit lest, en reculant le scrutin présidentiel du 6 juin au 18 août. La COD qui avait fait beaucoup de résistance se fera berner in finish aux détours d’Accords de Dakar qui s’avéreront par la suite une véritable monnaie de singe. Le résultat est connu : une présidentielle sera organisée avec la participation d’un nombre record de douze candidats, avec à l’arrivée la victoire de Mohamed Ould Aziz, au premier tour ! Cette fois, l’opposition qui regrette encore son amateurisme politique de 2009, celui de Dakar, et qui ne veut pas retomber dans le piège, a décidé de rester sur ses gardes. Aussi, exige-t-elle les plus grandes garanties de transparence et de justice au cours des scrutins législatifs et municipaux en vue. Entre autres, neutralité de l’administration, aussi bien civile que militaire, mise en place d’un gouvernement d’union nationale, recomposition de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), neutralité des médias d’Etat et leur ouverture à l’ensemble des acteurs politiques, etc. Comme en 2009, Mohamed Ould Abdel Aziz compte en toute apparence, réitérer sa botte qui consiste à mettre la bouilloire de la pression au maxi avant de soulever un peu le couvercle. Cette astuce a le don de faire croire au citoyen lambda et aux partis politiques peu exigeants que le pouvoir a fait des concessions. Beaucoup d’ailleurs ont mordu à l’hameçon. Certains partis de l’opposition, notamment ceux de la Coalition pour une Alternance Pacifique (CAP) qui regroupeAPP, Sawab et El Wiam descendront certainement dans l’arène, malgré de faibles protestationsquant à l’immixtion des généraux et des administrateurs dans le jeu électoral. Il en est de même pour les partis de l’Alliance Patriotique, ADIL, RPM et Renouveau Démocratique. Ces six partis politiques, ajoutés à d’autres appartenant à la COD et qui viendront compléter le tableau desparticipationnistes pour ne pas sombrer dans l’oubli politique pendant les cinq prochaines années, constituent le bataillon « Azizéen » de l’opposition. Ceux qui en principe devront réduire le taux d’illégitimité des prochaines consultations.
Ainsi, parmi les partis de la COD qui, selon les tendances les plus sérieuses, prendront part aux législatives et municipales prochaines, diverses sources citent les partis Hatem de Saleh OuldHanana, Moustaqbal de Mohamed Ould Borboss ou encore Tawassoul de Jemil Ould Mansour, ou encore l’UFP de Mohamed Ould Maouloud. Cette tendance sera confirmée ou infirmée lors du regroupement prévu ce jour, dimanche 1er septembre 2013 : une assemblée au cours de laquelle sera lue la déclaration finale des leaders de la COD, en conclave depuis plusieurs jours, sur une participation ou un boycott. Quels bénéfices pour un boycott ? En maintenant la motion de boycott, c’est sûrement le RFD d’Ahmed Ould Daddah qui sera le plus perdant. Il donnerait, la voie libre au Pouvoir, pour faire passer comme il veut, et pendant toute une législature, les lois qu’il voudra faire passer. Ce fut le cas au Sénégal où l’opposition au temps deWade, avait, par son boycott, permis à celui-ci de régner « sans partage ». Considéré comme l’un des plus grands partis de l’opposition démocratique, cette formation politique ne devrait pas gagner au change. L’absence du RFD dans les conseils municipaux et le Parlement durant les cinq prochaines années sera sans nul doute fatale pour ce parti qui a toujours joué les premiers rôles en Mauritanie. Déjà, les expériences de 1992 où le parti avait séché les législatives et les municipaux et celle de 1997 où il avait boycotté la présidentielle devraient lui servir de rappels douloureux. Encadré
La COD soumise à l’intox des RG A l’époque, le RFD s’était effacé de la scène, provoquant en son sein des hémorragies qui lui seront fatales, mais importantes pour l’ancien parti au pouvoir le PRDS. Ce dernier avait en effet raflé en 1992 les 79 sièges de l’Assemblée Nationale. A l’époque la COD s’appelait le Front Uni des Partis d’Opposition (FUPO) et l’UPR s’appelait le PRDS. Remake d’une période qui ressemble à s’y méprendre à celle du présent, avec une junte militaire qui contrôle tout le processus politique, un parti-Etat omnipotent, une administration sous commandement et un président qui contrôle et décide de tout. Sécher de pareilles consultations et s’exclure du jeu politique est un suicide tout comme une participation sans garanties ressemblerait fort à une marche inexorable vers l’abattoir électoral. Un dilemme que beaucoup de partis d’opposition semblent avoir résolu en décidant d’y aller tête baissée, et que le RFD rumine encore avec douleur. Et la tête de file de ces formations politiques est sas nul doute Tewassoul ; le parti desislamistes ne semble plus hésiter quant à sa participation ! L’expérience du boycott dans plusieurs pays, comme au Togo durant les législatifs de juin 2013, celle du Burundi où le boycott des forces de l’opposition remettait en cause dix ans de progrès pour la construction de la paix, ou encore celle du Tchad où le mot d’ordre de l’opposition était que « Déby va aux élections contre Déby », ont prouvé que cette arme a souvent très peu empêché les régimes dans ces pays de poursuivre leur marche aveugle, avec toutes les conséquences qui en ont résulté en termes de crise politique et institutionnel ou de troubles sociaux. En définitive, les partis d’opposition boycottistes sont confrontés aujourd’hui à un véritable problème de survie politique. Leur absence aux prochains scrutins risque de provoquer le départ massif de leurs cerveaux en quête d’implication politique ailleurs. Leur participation, sans aucune garantie de transparence, risque également de leur être fatal, les données du scrutin leur échappant totalement. Ce sera certainement une occasion pour le régime de les humilier davantage en leur concédant des scores peu honorables. Entre les 48% d’Ahmed Ould Daddahaux présidentielles de 2007 et ses 13, 66% en 2009, l’humiliation fut en effet totale. Alors, par quelle alchimie, la crise électorale sera-t-elle résolue ? Cheikh Aïdara. source:http://lauthentic.info |
Dimanche, 08 Septembre 2013 13:56 |