Nouakchott progresse dans tous les sens de la même manière. A l’orée des quartiers extérieurs, se détachent quelques habitats modestes, masures éparses, qui vont peu à peu violer les sauvages étendues désertiques, s’incruster entre deux dunes, se poser au milieu d’un vallon.

Ces huttes en attirent petit à petit d’autres, puis des hangars, ensuite des tentes enfin des chambrettes hâtivement posées sur un terrain dégagé, viennent enrichir le panorama. Une boutique attire un boucher qui inspire des vendeuses de légumes, qui influencent celles du couscous et autres galettes. Un mini marché voit le jour autour duquel s’organise bientôt une vie quasi autonome. La Gazra (Squatt) née, bientôt reliée à la ville par une route couverte de remblais, le long de laquelle fleurissent d’autres boutiques et autres logis.

Mis devant le fait accompli, les pouvoirs publics procèdent au lotissement et à l’aménagement des lieux. La Gazra devient quartier avec ses inévitables écoles, dispensaires, mosquées, mairies, commissariats de police et son hakem.

Tous les quartiers de la ville sont nés pratiquement de la même manière. Ce sont les populations chassées de l’intérieur du pays par la misère, le chômage, l’abandon qui viennent, attirées par les mirages d’une ville aux mœurs souvent cruelles. Vivant de petits métiers, ces populations se trouvent à la périphérie, là où la logique mercantile de la ville ne s’exerce pas. Ce sont des pionniers qui vont investir ces solitudes anonymes à la recherche d’un coin de paix. Les autres, plus aisés financièrement, les rejoignent pour cohabiter avec eux un moment avant de leur reprendre ces terres, les repoussant plus loin…

Là bas, vers le nord, au-delà de la Ceinture verte, dans cette étendue séparant Tevragh Zeïna et Teyarett, des habitations commencent à voir le jour. Une route est déjà tracée. Quelque chose nous dit que le désert, après avoir bouffé la végétation, s’apprête lui aussi à être grignoté par les habitations…

Amar Fall