À la SOMELEC tout passe sauf le courant |
Mohamed Salem Ould Béchir a bien gagné son nouveau poste de Ministre de l’Hydraulique et de l’assainissement. Il a été dignement récompensé car en tant que Directeur Général de la SOMELEC il a réussi à peu près tout ce qu’il a entrepris pour enrichir le clan au pouvoir et entretenir la pénurie d’électricité si précieuse à ce dernier qui l’utilise pour faire taire les voix discordantes. Si l’ONG SHERPA n’avait débusqué récemment un loup dans l’affaire WÄRTSILÄ, l’ensemble de ce système occulte de détournements de fonds serait même passé totalement inaperçu à l’international… Des dizaines (centaines ?) de millions € évaporés comme par magie : En plus du financement de son financement par l’Etat (voir annexes 1 et 2), la SOMELEC a obtenu des prêts importants de l’AFD : 65 millions € en 2010-2011. Et surtout, alors que la distribution d’électricité ne fait aucun progrès dans le pays depuis si longtemps, les nouveaux projets fleurissent et sont financés tel des puits sans fond par les plus grands bailleurs internationaux, comme la BID et le FADES. La BID justement, qui suite à l’alerte lancée par SHERPA a osé émettre des doutes à propos d’un de ces projets (la Centrale Électrique de Nouakchott et son extension accordée de gré à gré à WÄRTSILÄ) en sursoyant au financement de ladite extension, s’est depuis heurtée à la colère du Chef de l’Etat mauritanien, chez qui son Président a dû se rendre expressément à la demande du Ministre des Finances d’Arabie Saoudite pour entamer la série de courbettes qu’exigeait la situation. Toujours est-il que les nouveaux projets de la SOMELEC sont bien financés, mais qu’ils ne voient jamais le jour, en tout cas pas sous forme d’électricité (un service si difficile à assurer ?) pour le peuple mauritanien ou les entreprises du pays… Ce qui n’empêche pas le gouvernement d’afficher et de vendre à l’étranger la belle santé de l’entreprise nationale du secteur, ce fleuron de l’industrie mondiale, au point que le Sénégal espère pour 2015 que la Mauritanie sera capable de lui fournir de l’électricité ! Le voisin sénégalais croit-il vraiment à cet engagement, ou fait-il le dupe pour participer à une opération de communication politique vis à vis des institutions internationales ? Car comme les dirigeants des deux côtés du fleuve le savent sans doute, il faudrait d’abord être capable d’assurer l’autosuffisance du pays avant de promettre d’exporter. Mais ce qui est assuré, c’est bien l’extension perpétuelle de la pénurie… … Car assurément le rôle des dirigeants de la SOMELEC et de toutes leurs équipes n’est toujours pas de fournir un service fiable ! Le prix de l’électricité en Mauritanie intègre la mauvaise gestion, c’est un serpent qui se mord la queue : la mauvaise gestion (ainsi que la corruption à tous les échelons incluant le « coulage » des hydrocarbures) entraîne un prix prohibitif pour les usagers, les usagers « mutualisent » les lignes, l’équipement est dégradé et la consommation comptabilisée en débit du bon sens, la facturation subit un processus à l’avenant de tout le reste de cette exploitation désastreuse d’un parc d’abonnés pourtant bien modeste… Le résultat ? Les prix augmentent encore, la pénurie progresse elle aussi, et, bien loin de rechercher dans une meilleur gestion de leur exploitation et dans une gouvernance sans faille les solutions à cette situation ubuesque, les dirigeants de la SOMELEC emploient toute une armée de fonctionnaires chargés de faire payer des factures surréalistes aux abonnés « identifiés », et ce en employant des méthodes dignes des plus mauvais films de gangsters : sur les 1 800 employés que comptent la SOMELEC, la plus grande partie est dédiée à ce recouvrement : on fait parvenir la facture le jeudi à l’usager, on lui coupe le courant le jeudi soir… autant dire qu’il n’a aucune chance que sa ligne soit rétablie avant le week-end qui débute tous les jeudis au soir. Que sa consommation soit mesurée à l’aune de celle de tout son immeuble, ce n’est pas le problème de l’équipe chargée de faire respecter le processus ! Et les victimes de cette nouvelle police politique sont souvent comme par hasard, ceux qu’il faut faire taire… Témoin cet homme d’affaires facturé l’équivalent de 50 000 US$ récemment à Nouakchott, mais c’est le cas de tous les citoyens, riches ou pauvres, qu’il s’agit d’intimider ou simplement de faire taire.
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Lundi, 10 Février 2014 10:16 |