LA JOURNÉE DE L'OCVIDH A MASSY VUE PAR UN OBSERVATEUR MAURITANIEN EN VOYAGE EN FRANCE |
Tant pis, me suis-je dit, je ferai quand bien même le maximum. Ce recensement a fait couler beaucoup d’encre et nombreuses sont les presses électroniques qui en ont parlé. Après avoir fini mon séjour marseillais le mardi, je suis arrivé à Paris le mercredi 12 février 2014 un peu tard dans la soirée et je m’empresse de rentrer chez mon correspondant en région parisienne.Le jeudi 13 février 2014, je me rends à Paris pour aller voir de mes propres yeux ce qui se passe dans notre ambassade, m’en faire une idée vraie sur la question du recensement tant décrié par nos compatriotes noirs mauritaniens.J’arrive aux environs de 13 heures et j’ai trouvé notre représentation diplomatique fermée pour des raisons « de travaux » m’ont expliqué les policiers français en faction devant la porte principale. J’ai demandé à rencontrer les membres de la mission diplomatique, les policiers m’ont fait comprendre, gentiment mais fermement, que l’ambassadeur a donné des instructions fermes « de ne laisser personne entrer dans l’ambassade ». J’ai demandé à rencontrer un membre de l’ambassade en me présentant et ce fut un refus poli mais catégorique encore. En retournant vers le Métropolitain, j’ai vu de loin un attroupement d’hommes et de femmes, des drapeaux mauritaniens accrochés aux poteaux des lampadaires, des pancartes déployées sur lesquelles on peut lire « AVEC CET ENROLEMENT, NOUS SOMMES TOUS APATRIDES » « OUI A L’ENROLEMENT SANS CARTE DE SEJOUR ». J’avance à petits pas et m’approche timidement de la foule qui crie « Nous sommes noirs et mauritaniens. Nous sommes fiers d’être mauritaniens. Soninké, mauritanien, Halpular, mauritanien, Oulof, mauritanien, Bambana, mauritanien, Hartani, mauritanien etc. » et d’autres slogans patriotiques entrecoupés par la musique mauritanienne peulh, soninké, ouolof bambara et maure. Ces gens là sont des compatriotes dignes. Ce sont nos parents mauritaniens, sinon, quel intérêt ont-ils à braver le froid, le regard hostile de quelques passants ou souvent complices. Ils sont mauritaniens et comptent le faire entendre. Ne dit-on pas que le premier combat religieux d’un homme pieux est celui du combat pour sa patrie ? Ce combat que mes compatriotes noirs sont entrain de mener est un combat noble. Et Ils le font avec le sourire et dans la bonne humeur malgré le désarroi qui se lit sur les visages. En un laps de temps, mon cœur commence à accélérer sa cadence en voyant mes compatriotes, dans ce froid glacial parisien, crier à la face du monde leur désarroi face à un recensement jugé discriminatoire. Des badauds et d’autres curieux, passant par là, s’arrêtent un instant pour savoir de quoi il s’agit et j’écoute attentivement les explications données par les organisateurs du SIT-IN. Quelques riverains sont passés aussi par là, pour dire aux organisateurs que le bruit les dérange. N’étant pas habitués à ce climat glacial, c’est frileusement, que je m’approche de la foule à pas lents mais rassurants.Je salue la première personne que je rencontre et me présente à elle en tant qu’étranger venant du Maghreb et que je suis attiré par leurs sifflets et leurs tam-tams. Une deuxième personne s’avance vers moi et me tend un papier qui a pour titre « Déclaration OTMF ET DIASPORA » que je me presse de mettre dans mon cartable pour le lire plus tranquillement après. Dès que je commence à parler, l’un des manifestants qui m’entouraient déclare avec assurance « vous êtes mauritanien » Etonné par une telle affirmation, je lui demande pourquoi me qualifie-t-il de mauritanien ? Il me dit que nous mauritaniens, nous nous reconnaissons par l’accent et par les attitudes. J’insiste pour dire que je suis algérien, il me répond par un non amuseur ! J’ai été frappé de la façon par laquelle il m’a reconnu mais je refuse de baisser la garde et insiste en disant que je ne suis pas mauritanien. Il me dit, « khouyé », vous êtes bien mauritanien ! Soyez rassuré car vous êtes entre vos frères et sœurs et il ne vous arrivera rien ici entre nous ! Le combat que nous menons ici n’est pas dirigé contre la communauté de nos compatriotes maures dont vous êtes issu mais contre nos gouvernants et leur système rétrograde qui veulent faire de la Mauritanie un pays de division, de haine entre ses composantes nationales. Et nous ne sommes pas fiers de notre ambassadeur en place ici à Paris car depuis son arrivée en France, nos vies de mauritaniens à l’étranger sont devenues un enfer et par sa méthode, il sème chaque jour la désolation dans les cœurs des milliers de ses propres concitoyens ». Devant de telles affirmations, je décline mon identité et commence à discuter avec tout le monde. Et dans la foulée, on m’informe qu’il y a une journée de rencontre convoquée par une association de défense des Droits Humains à Massy ce dimanche 16 février 2014 et que je suis invité en tant que mauritanien et si je désire y assister et comprendre leur désarroi. Je prends l’adresse et me renseigne sur les moyens d’y accéder par le transport. Des explications claires me furent données. La journée de ce 16 Février 2014 à Massy : C’est dans une grande salle presque comble que je rencontre les mauritaniens. Nous avons partagé ensemble un repas préparé par l’association. Des mauritaniens accueillants, calmes et aimant partager tout avec tout le monde sans oublier les attentions du genre, « mange, prends de la boisson, il y a de l’eau, du Coca, du jus de fruits. J’étais vraiment aux petits soins. Cette marque de sympathie est vraiment mauritanienne ! En voyant tous ces compatriotes, jeunes et dynamiques dont la Mauritanie a besoin, la première idée qui m’est arrivée en tête était de me dire dans mon for intérieur, toute cette jeunesse, toute cette énergie jetées à la poubelle par une politique de division, quel gâchis ! Après cette ambiance conviviale, les débats ont commencé et j’écoute attentivement quasi religieusement les explications données par les représentants de l’OTMF et le représentant de la DIASPORA. Le représentant de l’OTMF a donné un aperçu historique de toutes les rencontres que leur organisation a eues d’abord avec l’autorité de notre ambassade, son excellence, Monsieur Mohamed Mahmoud Ould Brahim Khlil, ensuite avec le chef de l’Etat, son excellence Mohamed Ould Abdel Aziz lors de son passage en France et enfin avec l’ensemble des membres de la commission chargée de l’enrôlement. » « Les premières contradictions, dira le représentant de l’OTMF, ont commencé avec l’ambassadeur à propos de la désignation de la commission d’identification pour l’enrôlement alors que ce dernier voulait imposer une personne de son choix parmi les représentants de l’OTMF et ces derniers refusent catégoriquement cette imposition et ont exigé de l’ambassadeur de leur laisser le droit de nommer, au niveau de leur organisation, les personnes habilitées à les représenter. Entre temps, des intellectuels mauritaniens ayant terminé leurs études ici en France et ne voulant pas rentrer au pays et certains anciens militaires mal intentionnés ont commencé à côtoyer l’ambassadeur pour lui insuffler des mauvaises idées qui ont conduit à cette impasse totale et depuis lors, l’ambassadeur s’est replié sur lui-même allant jusqu’à refuser d’appliquer les consignes données par le président de la République dans le sens de rendre facile l’enrôlement des mauritaniens ici en France et en Europe. » « Au moment où je vous parle, dira en substance le représentant de l’OTMF, des mauritaniens ont perdu leur travail, leur logement et leur vie de famille. Ils ne tarderont pas à être expulsés de leurs logements car ils accumulent des impayés de loyers. Leurs situations sont dramatiques à cause d’un seul homme, l’ambassadeur Ould Brahim Khlil, qui est entrain de rendre ses propres compatriotes apatrides : ils n’ont plus de carte de séjour et ne peuvent pas se recenser. C’est un cri de détresse que nous lançons à notre communauté nationale pour qu’elle réagisse face à cette injustice qui frappe nos compatriotes noirs ici en France et en Europe », conclut le représentant de l’OTMF. Des interventions constructives et des échanges fructueux entre la salle et les représentants de l’OTMF et de la DIASPORA ont abouti à la conclusion de ne pas « baisser les bras et de se battre avec tous les moyens légaux afin d’exiger des autorités mauritaniennes la levée de l’exigence de la carte de séjour imposée par notre ambassadeur. » De l’avis général, est mauritanien, toute personne ayant ces pièces d’état civil : passeport, carte d’identité (ancienne ou nouvelle), acte de naissance (ancien ou nouveau) ou certificat de nationalité. En conclusion : Après avoir vu et entendu je suis en droit de conclure que les services de l’ambassade ont quelque chose à se reprocher. Le refus de la police française de me laisser entrer dans l’enceinte de mon ambassade démontre un abus de pouvoir de la part de notre ambassadeur. Quel que soit le motif, une ambassade doit avoir une permanence en son sein et tel ne fut pas le cas. Je comprends amplement la détresse de mes compatriotes en France. Moi qui suis de passage en France, et en moins de deux heures, je me suis rendu compte des difficultés administratives auxquelles sont confrontés nos compatriotes et la difficulté d’avoir accès à notre ambassade et voire impossible de communiquer avec un seul représentant. De cette expérience sur le terrain, je lance un appel solennel au Président de la république, son Excellence, Mohamed Ould Abdel Aziz et à notre ministre des affaires étrangères et de la coopération de trouver une réponse rapide et ce dans un bref délai au calvaire de nos compatriotes.Ces manifestations et SIT-IN à cause d’un seul homme ne rendent pas service à notre pays. Ils constituent une mauvaise publicité et une source de tension pour notre peuple paisible. Toutes les représentations diplomatiques ont vocation de faciliter la vie de ses concitoyens à l’étranger mais celle de la Mauritanie à Paris navigue à contre courant. La Mauritanie qui préside l’unité africaine (UA) doit trouver une solution aux problèmes de ses propres fils avant de se porter défenseur de tout un continent. Un gouvernement et ses fonctionnaires doivent être au service de ses citoyens le contraire ne peut être démontré Yakhoub Ould Moulaye Abdallah Juriste Nouakchott
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Mardi, 18 Février 2014 16:05 |