l'Edito de MFO |
Par deux fois le Président Mohamed Ould Abdel Aziz se retrouve dans le rôle du «missionnaire» de l’impossible sur des conflits en Afrique. Pour sa position de président du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine.Par deux fois, notre pays accueille donc des réunions de panel de chefs d’Etats (quatre à chaque fois). De tous les points de vue, l’organisation, l’accueil et le séjour parmi nous furent des réussites. De l’avis même de nos hôtes.
La première fois, la Mauritanie a accueilli par deux fois le groupe de haut niveau chargé de la Côte d’Ivoire : Afrique du Sud, Zambie, Burkina Faso et Tchad. Sous la présidence du nôtre, ils se sont rendus une première fois à Abidjan, et une deuxième fois à Addis-Abeba. Chaque fois pour entendre les belligérants dans le conflit postélectoral ivoirien. La deuxième fois, c’est celle qui vient de se terminer à Nouakchott et qui se rapportait à la Libye. Là, le panel se composait des chefs d’Etats du Mali, du Congo Brazzaville, de l’Ouganda et de l’Afrique du Sud. Les deux derniers ont préféré envoyer leurs ministres des affaires étrangères. Pour les deux fois, la Mauritanie s’est retrouvé propulsée au devant de la scène africaine. Ce qui ne lui est pas arrivé depuis une trentaine d’année, sinon plus. Et c’est ce qui m’intéresse ici. Parce que cela doit avoir des retombées positives sur les orientations de la diplomatie mauritanienne… Je sais – nous savons tous – que parler de «diplomatie mauritanienne» est (presque) un abus de langage. Tellement nous avons navigué à vue ces dernières décennies. Le résultat fut pour nous la perte des vocations premières dont la plus essentielle pour nous est celle qui voulait faire de nous un point de convergence entre l’Afrique noire et le Maghreb. Ce que les bâtisseurs avaient exprimé par l’expression «trait d’union», et que la malveillance des uns avaient traduit en Arabe par «hamzatou el waçl» qui n’a pas d’incidence sur le langage. Alors une idéologie a dirigé notre action diplomatique : pour affirmer notre identité arabe, il fallait nécessairement couper avec notre enracinement africain. Vision contre-nature. Fatalement nous nous sommes retrouvés dans cette position du «ni, ni» : ni africaine ni arabe. Nous ne pouvions véritablement dans un Maghreb très en avance par rapport à nous, ni dans une Afrique noire pour laquelle nous affichions un dédain injustifié. Les événements avec le Sénégal aidant, la Mauritanie se retrouvé orpheline de son environnement géopolitique naturel, dépossédée de sa vocation naturelle d’être l’interface pour l’un et l’autre des mondes arabe et africain. Arrivera l’ère de l’extravagance dans les positions qui atteint son paroxysme avec les conflits ouverts avec les voisins du nord et du sud, puis la sortie de la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avec l’établissement de relations avec Israël. L’incongruité et l’inconstance caractériseront alors notre diplomatie. Affirmer la personnalité mauritanienne, c’est sans doute réhabiliter la vocation de «trait d’union», de point de convergence, d’interface, appelez-le comme vous voudrez. Nous avons aujourd’hui la chance de pouvoir le faire, cela passe par l’exploitation efficiente des opportunités qui nous sont offertes. D’abord celle du retour sur la scène africaine. En parler pour mettre en exergue le rôle qui est le nôtre, qui doit être le nôtre et qui peut être le nôtre : nous ne sommes rien pour le Monde arabe si on ne lui apporte pas notre ancrage africain. Et vice-versa. Cela devra se concrétiser par l’ouverture d’un débat sur le retour dans les organisations sous-régionales comme la CEDEAO. Pourquoi d’ailleurs ne pas le décider sans attendre ? Tout le monde dit aujourd’hui que nos ressortissants souffrent de cette sortie qui a été catastrophique pour eux dans le pays qui les accueillent. En tout cas, avec la chute du régime libyen et la partition du Soudan, toutes les portes sont ouvertes devant la diplomatie mauritanienne pour reprendre ce rôle moteur qui a été les siens en des moments où le pays ne pesait point. A nous de jouer. La Tribune N°542 du 21 mars 2011
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Dimanche, 20 Mars 2011 21:34 |